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L’image qui respire : entre peinture naïve et mouvement vivant

par Pierre Martin

Il y a dans mes toiles une tension douce entre le silence et le souffle. Un coq qui ne dit rien, mais qui veille. Un chat noir — Jack — qui ne miaule pas, mais avance, un peu à contre-courant, à la lisière du visible. Ces figures, que je peins avec mes couleurs franches et mes élans spontanés, finissent toujours par me demander une chose : vivre un peu plus longtemps.

C’est ainsi que mes toiles ont commencé à bouger. Pas comme un film. Plutôt comme un soupir. Comme si l’image voulait respirer.

L’animation comme prolongement du regard

Quand je peins, je laisse le geste guider l’histoire. Mais certaines scènes me reviennent, insistantes : et si la baleine tournait la tête ? Et si les sirènes glissaient un peu plus près du rivage ? Et si Jack, dans sa barque, décidait de quitter les hommes pour suivre une étoile ?

Ces mouvements-là ne changent rien à la peinture. Mais ils l’ouvrent. Ils en déplient les silences. L’animation, dans mon travail, n’est pas une performance. C’est un écho, un murmure visuel qui prolonge ce que le pinceau a laissé en suspens.

Ce que je vous présente aujourd’hui, c’est une série d’histoires fragmentées, mais liées par une même respiration :

Un fjord nocturne, où Jack le chat, un ours et un pingouin marchent près d’un phare. Au loin, les maisons veillent. Et sous la glace, un silence bleu les unit.

Plus loin, les baleines dansent sous une lune blanche, pendant qu’un oiseau bleu fend l’air au-dessus d’un camp de caribous. Frank et William, mes vieux marins imaginaires, pointent le ciel comme s’ils y voyaient l’avenir.

Puis, Jack repart seul, en barque, traversant un océan habité d’ombres douces. Une baleine blanche, presque effacée, semble le guider.

L’image suivante dévoile une éclipse et une baleine céleste. Le chat est toujours là, posté au bord d’une falaise, témoin muet de cette visitation cosmique.

Et quand le monde devient féérique — avec des fées, des poissons ailés, et une orque au creux des chutes —, Jack reste au bord, comme s’il se rappelait que tout cela est possible… mais fragile.

Enfin, une clairière, une mer douce, des méduses qui flottent, un arbre sacré. Des humains qui dansent, un chapiteau, un coq, une colombe. Et encore Jack, au milieu, toujours noir, toujours là.

Le fil narratif : Jack le chat

Dans toutes ces toiles, Jack est le fil conducteur. Il ne parle pas. Il observe, traverse, choisit. Il refuse parfois l’émerveillement. Ou peut-être s’y abandonne-t-il mieux que nous, justement parce qu’il ne tente rien d’autre que d’être là.

Jack est plus qu’un personnage. Il est ma façon de poser une question sans l’imposer :
Et si on regardait un peu plus lentement ?
Et si l’image pouvait parler, non pas plus fort, mais plus loin ?

L’animation dans mon art n’est pas un effet. C’est un complément narratif, une extension du souffle naïf. Chaque tableau devient ainsi un chapitre. Chaque mouvement, une ponctuation.

Ce que je cherche, ce n’est pas de moderniser mes œuvres. C’est de leur laisser le droit de cligner des yeux.

Et vous, si vous pouviez entrer dans une toile, laquelle choisiriez-vous de suivre jusqu’au bout du silence ?

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